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Le blog d'Alain Boublil

 

Et pendant ce temps là...

Le monde entier, depuis le début de ce mois de novembre, a eu les yeux tournés vers les Etats-Unis, et s’est interrogé sur les chances respectives des deux candidats. Jamais une élection n’avait eu un tel retentissement, pour deux raisons : le résultat est resté indécis jusqu’à la fin, avec des fluctuations à chaque incident et la personnalité de l’un des deux candidats fascine les uns et inquiète les autres. Personne n’est en mesure de prévoir les conséquences économiques d’une élection de Donald Trump. Cette incertitude est lourde de conséquences et risquerait de durer jusque dans le courant du mois de janvier quand la passation de pouvoirs entre Barack Obama et celui  qui lui succédera interviendra. Mais la terre ne s’est pas arrêtée de tourner et des évènements importants sont passés inaperçus.

Il y a eu d’abord l’ouverture de la COP 22 au Maroc. L’Accord de Paris est entré en vigueur. Il s’agit maintenant de passer à des mesures concrètes, sinon cela n’aura servi à rien. Les déclarations de bonnes intentions entendues il y a un an sont simplement une étape. Ce qui compte, c’est de voir sur le terrain comment elles vont se traduire. Il y a eu deux bonnes nouvelles, une incertitude majeure et une déception. Les bonnes nouvelles viennent de deux émetteurs majeurs de gaz à effet de serre, la Chine et l’Inde. La prise de conscience des conséquences catastrophiques du recours excessif au charbon pour produire de l’électricité, dans ces deux pays a abouti à des décisions courageuses. La Chine a plafonné sa production, ce qui a déclenché une envolée des cours mondiaux, rendant cette source d’énergie moins compétitive et accélérant son déclin. L’effort en faveur en faveur du nucléaire et des énergies renouvelables dans ces deux pays s’accélère puisqu’ils disposent de vastes territoires semi-désertiques et ensoleillés. L’Inde a conclu deux partenariats, l’un avec Rosatom, qui a mis en chantier deux centrales, l’autre avec le Japon, à l’occasion de la visite du premier ministre Abe à New Delhi cette semaine. Toshiba, l’actionnaire de Westinghouse, devrait en bénéficier et lancer la construction de plusieurs réacteurs AP 1000. L’incertitude concerne les Etats-Unis. Hillary Clinton s’était inscrite dans la ligne de la politique de son prédécesseur, mais Donald Trump est partisan d’un retour en arrière et d’une dénonciation de l’Accord de Paris. Enfin la déception vient de l’Europe où Bruxelles est incapable de faire entendre raison à l’Allemagne et à la Pologne, qui protègent leur industrie charbonnière, pour faire adopter un véritable mécanisme de fixation du prix du carbone qui oriente l’Europe de façon crédible vers le respect de ses engagements.

Pendant ce temps là, la Chine reste sur sa trajectoire de croissance et le troisième trimestre a été conforme aux attentes, avec un taux de 6,7%, identique à celui des deux trimestres précédents. La production industrielle augmentera de 6% en 2016 et la consommation d’énergie par unité de production aura baissé de 5,2%, ce qui signifie que le pays se rapproche d’un modèle où la croissance reste élevée mais est économe en énergie. La réorientation en faveur des services et de la consommation intérieure dans le PIB s’inscrit dans cette stratégie. La Chine devient moins dépendante de son commerce extérieur, ce qui se traduit dans sa balance commerciale avec une chute des importations comme des exportations. Mais cela n’empêche pas le pays de poursuivre le développement de partenariats extérieurs. Dans l’indifférence générale en Europe, le Premier ministre chinois s’est rendu à Riga, en Lettonie pour un sommet 16+1 réunissant son pays et 16 nations du centre et de l’est de l’Europe, appartenant ou non à l’Union Européenne. Ont été célébrés, par exemple, des projets communs d’infrastructures financés par Pékin comme la ligne ferroviaire Budapest-Belgrade et des accords pour développer les échanges des produits agricoles dont la Chine aura besoin dans l’avenir.

Le niveau des réserves en devises de la Banque de Chine a à nouveau baissé en octobre, du fait de la volonté du pays de freiner la baisse du yuan face au dollar et de l’effet comptable de la dévaluation, face au dollar, des autres monnaies figurant dans ses réserves. Le Comité central du parti communiste chinois a renforcé la position des dirigeants actuels. Un nouveau ministre des finances a été nommé pour succéder à Lou Jiwei, qui avait été l’un des artisans du développement international du pays. Son successeur, Xiao Jie était  en charge jusqu’à présent de la fiscalité et a probablement été choisi pour mettre en place des instruments pour favoriser les restructurations financières qui attendent le secteur public.

Toujours pendant ce temps-là, la Haute cour de justice britannique a ajouté une dose de confusion dans la procédure du Brexit en décidant que le Parlement devrait donner son accord pour le déclenchement de l’article 50. Le débat sur les deux formes envisagées de sortie de l’Union n’a pas beaucoup de sens puisque tout dépendra de la décision de chacun des 27 autres membres. L’idée suivant laquelle Londres pourrait conserver tous ses avantages économiques et financiers, pour la City comme pour les usines implantées sur son sol, soit le « soft Brexit » tout en se soustrayant à la liberté de circulation des  personnes, qui fut la raison du vote du 26 juin, est illusoire. Ses anciens partenaires européens ne l’accepteront pas. On peut s’attendre à des années de discussions, pendant lesquelles interviendra une élection législative. Il serait imprudent de penser que l’enjeu d’une telle élection ne soit pas la remise en cause du référendum. Le feuilleton anglais n’est donc pas prêt de trouver son épilogue.

Enfin, pendant que tout le monde avait les yeux tournés vers l’Amérique, l’économie française a apporté de nouvelles confirmations de l’échec de la politique du gouvernement. La croissance pour l’année 2016 va devoir être à nouveau révisée en baisse. Parler d’ailleurs de croissance pour des chiffres aussi faibles est inapproprié. Après une baisse de 0,1%% du PIB au 2ème trimestre, l’augmentation n’a été que de 0,2% au 3ème trimestre. Les chiffres du chômage du mois de septembre après ceux catastrophiques du mois d’août, ne doivent pas faire illusion. Ils résultent, à la rentrée, des programmes de formations des jeunes. La mesure est bienvenue mais son interprétation économique n’a pas beaucoup de sens. Si la croissance du chômage, depuis quatre ans s’est effectivement ralentie, voire stoppée, le niveau atteint est tel qu’il n’y a pas de quoi pavoiser. Les transferts importants en faveur des entreprises consentis depuis 2013 n’ont eu aucun effet sur l’investissement et encore moins sur la capacité de notre économie à redresser ses échanges extérieurs. Les chiffres du commerce extérieur du mois d’octobre qui viennent d’être publiés, sont, comme ceux des mois précédents, accablants. En deux ans, le France a perdu tout l’avantage qu’elle avait tiré de la réduction des prix du pétrole et du gaz. Le déficit pour cette année approchera 50 milliards d’euros, alors que l’Allemagne a un excédent de 200 milliards et l’Italie de plus de 50 milliards. Ces deux indicateurs, l’emploi et le commerce extérieur montrent à quel point la stratégie conduite depuis quatre ans n’a pas atteint les résultats escomptés. La fin des incertitudes liées au résultat des élections américaines permettra peut-être un rebond de l’économe mondiale. Encore faudrait-il que nous sachions en tirer parti.