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Le blog d'Alain Boublil

 

La mondialisation est irréversible

Le dernier échec de Donald Trump sur l’abrogation de l’ « Obamacare » en annonce d’autres. Il est hautement probable que les dispositions protectionnistes auxquelles il songe et qui ont été un des temps forts de sa campagne électorale ne seront jamais adoptées. La transformation de la fiscalité américaine, sauf à adopter la TVA, pour pénaliser les importations et alléger les charges des entreprises, ne verra pas le jour, pas plus que des mesures autres que symboliques vis-à-vis du Mexique. La raison en est simple : les Etats-Unis ont plus à y perdre qu’à y gagner. Le renchérissement des importations pénaliserait les consommateurs américains. Les inévitables mesures de rétorsion prises par les pays visés gêneraient les entreprises exportatrices. Elles constitueraient un frein aux investissements étrangers sur le territoire américain et pèseraient finalement sur l’emploi. Le protectionnisme est une illusion et ceux qui y tomberaient s’en apercevraient rapidement. L’histoire des 50 dernières années nous l’a montré. De tout cela, la majorité des membres de la Chambre des représentants comme les sénateurs en sont bien conscients. Et si cela ne suffisait pas, on peut compter sur les puissants lobbys de K Street, la rue à Washington où ils ont leurs bureaux non loin du Capitole, pour leur expliquer les enjeux à la demande de leurs clients, les grandes entreprises américaines .

La mondialisation est irréversible parce qu’elle résulte d’un puissant mouvement d’innovation qui n’est pas près de s’interrompre. Elle correspond aussi à de réelles aspirations des agents économiques, même si ceux-ci n’en sont pas toujours conscients et s’ils refusent parfois de se l’avouer. Le point de départ a été la baisse des coûts de transport, pour les marchandises comme pour les personnes. La hausse des prix du pétrole n'a pas réussi à la freiner. Les conséquences économiques ont été considérables : de nouvelles opportunités se sont ouvertes pour des producteurs avec l’accès à des marchés lointains. Le développement des échanges d’information a suivi. Il ne s’est pas cantonné aux entreprises. L’ordinateur est devenu un produit de grande consommation. La capacité des réseaux de transmission s’est accrue en quelques années dans des proportions inimaginables. Au même moment, des moyens de communication de plus en plus petits mais disposant d’une puissance de traitement de plus en plus grande à un coût qui s’effondrait a complètement changé le regard que chacun portait sur les distances comme sur les différences entre les peuples. Personne n’imagine un retour en arrière avec l’instauration de barrières restreignant les communications. Or celles-ci débouchent souvent  sur des échanges de biens et de services à travers toute la planète. Qui peut imaginer remettre en cause le libre accès à internet et à tous les services qu’il procure ?

Le développement du commerce mondial a apporté deux transformations majeures. Il a considérablement élargi les choix offerts aux consommateurs. Même si elle n’est pas quantifiée, il existe chez ceux-ci une exigence croissante de choix, une volonté affirmée d’avoir accès à une large variété de produits. Cette exigence ne peut être satisfaite que si le marché national sur lequel ils s’approvisionnent, est ouvert. Cette ouverture a exercé une pression salutaire sur les producteurs locaux, sur leurs prix mais aussi et surtout sur la qualité sous toutes ses formes. Tant que leur marché était protégé, ils n’étaient pas incités à faire des efforts pour améliorer leur offre. Les exemples abondent, de l’Allemagne de l’Est avant la réunification jusqu’au Brésil en passant par la Chine de Mao ou l’Inde. Très peu d’entreprises de ces pays ont réussi à s’imposer sur les marchés internationaux quand ceux-ci se sont ouverts et beaucoup ont disparu. On cite toujours la concurrence déloyale imposée par les pays à bas salaires quand on fait le procès de la mondialisation. Mais on oublie d’ajouter que si cette forme de concurrence existe pour tout le monde, il y a des pays qui ont parfaitement su s’y adapter comme la Suisse ou l’Italie, pour ne pas citer l’Allemagne, qui années après années ont de confortables excédents commerciaux alors que d’autres, comme la France, qui a de lourds déficits, persistent à penser que cela constitue un handicap et qu’il est indispensable de revenir en arrière. A cet égard Marine Le Pen rejoint Donald Trump dans son contresens sur les causes profondes des déséquilibres des uns et des excédents des autres.

Replier la France sur elle-même, comme le suggèrent la candidate de Front National et Jean-Luc Mélenchon ne constitue pas seulement un reniement de la tradition historique de notre pays  et une atteinte à son rayonnement. Cela aboutirait aussi sur le plan économique à un désastre car les pays qui sont nos clients procéderaient exactement à notre égard de la même manière. Nous exportons plus de 20% de notre PIB. Les emplois dans ces secteurs seraient durement touchés. Comme en plus nous devons importer la plupart de nos matières premières, cela aboutirait à creuser encore davantage notre déficit extérieur, à affaiblir notre monnaie et à renouer avec la fâcheuse pratique des dévaluations. Appauvrissement général, pertes d’emplois, taux d’intérêt remontant en flèche alourdissant le service de la dette, toutes les conditions seraient réunies pour plonger l’économie française dans une crise d’une extrême gravité dont nos compatriotes seraient les premières victimes.

La vérité, c’est que la France n’a pas le choix. Il est illusoire de penser que l’on peut sortir de la mondialisation. La seule réponse est de s’y adapter pour en tirer avantage et la priorité, c’est de comprendre les mécanismes qui la gouvernent comme l’ont fait depuis longtemps nombre de nos voisins européens. Contrairement à ce que l’on nous répète, ce ne sont pas nos structures qu’il convient de « réformer » mais nos comportements qui doivent évoluer. D’abord l’Etat et les collectivités locales doivent se fixer comme objectif de réduire leurs coûts et d’améliorer la qualité des services rendus. Cela contribuera à réduire les déficits publics et à stabiliser les prélèvements. Ensuite, les consommateurs doivent enfin comprendre que les prestations sociales de toutes natures dont ils bénéficient et auxquelles ils sont très attachés, sont financées par leurs achats. Il ne s’agit pas là de « patriotisme » économique, notion qui évoque une part de sacrifice, mais de leur intérêt bien compris. Ce changement de comportement s’applique aussi aux administrations et aux entreprises. On parle à satiété de « filières », c’est –à-dire d’ensembles d’entreprises qui s’approvisionnent les unes auprès des autres pour satisfaire le client final. Elles doivent se comporter en partenaires et non chercher en permanence à prendre des avantages les unes sur les autres. Cela concerne les délais de paiement, la coopération à long terme quand la mise en place de nouvelles technologies s’impose et plus généralement une indispensable solidarité tout au long des maillons de la chaine de production. C’est à cette condition que la compétitivité de chacun sera renforcée et non en créant des rapports de force entre clients et fournisseurs ou en faisant pression sur les salariés au risque de ranimer une « lutte des classes » qui ne fera que des perdants.

La mondialisation, c’est le monde d’aujourd’hui et de demain. La refuser ou la condamner est facile mais ne mène nulle part comme Donald Trump va bientôt en faire l’expérience. Il serait dommage qu’en France on n’en tire pas les leçons et  s’engage dans une voie sans issue alors qu’il suffirait de la part de notre personnel politique d’un minimum de lucidité et de pédagogie pour que notre pays fasse les progrès nécessaires.

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