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Le blog d'Alain Boublil

 

Les conséquences économiques de Donald Trump

Les batailles militaires se gagnent grâce à des alliances appropriées. Il en va de même en économie où l’on emploie plutôt le terme de concurrence, mais le résultat est le même : il y a des gagnants et des perdants. Le président des Etats-Unis semble ignorer cette évidence. D’un côté il affiche, à la différence de ses prédécesseurs, une volonté de puissance sans limite mais en même temps, il s’isole. Chacune des réunions auxquelles il participe ou des rendez vous qu’il accorde, et ils auront été nombreux au mois de juillet, révèlent de profonds désaccords. Le Sommet de l’OTAN a vu la mise en accusation des pays européens. La rencontre avec Vladimir Poutine n’a abouti à aucun résultat concret sauf à déclencher une tempête politique aux Etats-Unis que les rétractations de la Maison Blanche n’ont pas calmé. On s’interroge sur ce qu’il adviendra du face à face avec Jean-Claude Juncker en visite à Washington cette semaine pour désamorcer le contentieux commercial qui prend de l’ampleur avec l’Europe.

Pendant ce temps là, les grands pays émergents se réunissent à Johannesburg où le président chinois achèvera sa tournée en Afrique. Il retrouvera dans la métropole sud-africaine, outre les dirigeants du pays hôte, ses homologues russes, indiens et brésiliens. Nul ne doute que le renforcement de leur coopération sera à l’ordre du jour. Peu après, à Singapour, ce sont les pays de l’Asean qui, suprême affront aux Etats-Unis, concluront un accord de partenariat économique avec l’Iran. Que le président américain le veuille ou on, les discussions internationales pour rechercher des accords profitant aux signataires se poursuivront. La lutte contre le réchauffement climatique s’intensifiera,  la libéralisation des échanges de biens et de services restera une priorité comme la recherche en commun de réglementations et la coordination des politiques économiques et monétaires pour parer aux risques de crise.

La sortie de l’accord avec l’Iran et le durcissement des sanctions contre ce pays a eu une conséquence immédiate : la hausse des cours du pétrole. Si elle réjouit les grandes compagnies américaines comme les producteurs qui exploitent les gisements de pétrole et de gaz de schiste, elle suscite le mécontentement de la population. La dernière trouvaille de la Maison Blanche serait de s’en prendre directement à l’OPEP et donc de se brouiller avec l’un des derniers soutiens des Etats-Unis dans la région, l’Arabie saoudite. On ne peut même plus exclure que cela aboutisse à une réconciliation du royaume avec son ennemi juré, l’Iran.

Avec l’Europe, c’est  pire. Donald Trump a affiché à maintes reprises une profonde hostilité envers ses alliés. Il y a d’abord le procès, au demeurant pas entièrement injustifié, sur le financement de l’OTAN. On peut avoir raison sur le fond et échouer à convaincre par son comportement. C’est ce qui vient de se passer. L’attitude à l’égard du Royaume-Uni est tout aussi incompréhensible. Au lieu de favoriser la recherche d’un bon accord sur le Brexit, le président américain met de l’huile sur le feu et fragilise la Première ministre britannique déjà en grande difficulté notamment du fait de l’épineuse question irlandaise. Vis-à-vis de l’Allemagne, le scenario n’est pas différent. La Chancelière est, elle aussi, affaiblie. Les menaces sur les exportations d’automobile constituent une vraie déclaration de guerre économique. S’il y a autant de Mercédès et de BMW sur la 5ème avenue, c’est bien parce que l’industrie américaine n’a pas été capable de produire des véhicules répondant aux goûts des consommateurs. Les taxer n’aboutira qu’à accroître leurs prix mais ne dissuadera certainement pas les futurs acquéreurs. Quant à l’accusation de soumission à la Russie à la suite de la construction du gazoduc Nordstream 2, elle est aussi ridicule que déplacée. Il faut bien faire face à l’épuisement des ressources en mer du Nord et que le gaz passe ou non par l’Ukraine ne change rien à son origine.

Les conséquences seront les mêmes vis-à-vis de la Chine. Le déficit entre les deux pays est le résultat de la stratégie de délocalisation de l’industrie américaine ou des politiques d’achat de la grande distribution. Les droits de douane seront répercutés et pèseront sur les ménages. Cela confortera la Reserve Fédérale dans sa volonté d’augmenter ses taux d’intérêt. L’incohérence de l’action du président qui alimente l’inflation d’un côté et qui en même temps critique l’action de la banque centrale dont la mission est de lutter contre elle apparaîtra encore plus clairement. Les producteurs américains seront également touchés. Le cas du soja est révélateur. La Chine est le premier importateur mondial. Jusqu’à présent le pays se fournissait surtout aux Etats-Unis. Les droits de douane instaurés par Pékin en riposte aux décisions de Donald Trump incitent déjà à se tourner vers l’autre grand producteur, le Brésil, dont les exportations sont en forte hausse. Au-delà de l’aspect simplement commercial, c’est bien le rapprochement entre ces deux pays, la Chine et le Brésil qui entretenaient peu de relations jusqu'à présent, qui est l’élément essentiel et qui va contribuer à isoler encore plus les Etats-Unis.

Dernière trouvaille de l’administration américaine, déclencher une guerre monétaire. Le niveau de l’euro est dénoncé et son recul récent attribué à une volonté de protéger les exportations européennes vers les Etats-Unis. Mais cet affaiblissement n’est que le résultat des nouvelles anticipations des marchés financiers sur l’action des banques centrales. Ils prévoient une hausse des taux américains du fait des tensions sur les prix et considèrent que le ralentissement économique provoqué par le déclenchement de la « guerre commerciale» incitera la BCE à conserver plus longtemps que prévu sa politique accommodante. Les perspectives de remontée des taux d’intérêt sont ainsi repoussées à une date sinon indéterminée, du moins plus lointaine qu’escomptée jusqu’à présent. Ce n’est, à l’évidence, pas sans conséquences sur la parité entre l’euro et le dollar.

Vis-à-vis de la Chine, l’accusation de manipulation se fait de plus en plus pressante. Mais elle est tout sauf convaincante. Comme en Europe, les autorités monétaires considèrent que la politique américaine fait peser une menace sur l’évolution du commerce mondial qui affectera les entreprises chinoises. Les résultats du premier semestre ont dépassé les objectifs fixés par le gouvernement avec un taux de croissance de l’économie supérieur à 6,5%. Mais pour éviter un ralentissement au second semestre, la politique monétaire a été assouplie avec une légère diminution du niveau des réserves imposé aux banques et une augmentation des liquidités à hauteur de 74 milliards de dollars. La marge de 2% de fluctuation du yuan a été confirmée et le niveau d’intervention de la banque centrale chinoise n’a été révisé en baisse que de 0,9%. En même temps, le gouvernement chinois a confirmé qu’il n’adopterait pas une politique de dévaluation de sa monnaie pour faire face aux décisions américaines.

Jusqu’à présent, les marchés financiers n’ont pas réagi de façon excessive au volet monétaire des déclarations de Donald Trump. Mais les leçons de la crise financière de 2007-2008 comme de la crise de l’euro en 2010 n’ont pas été oubliées. C’est par la concertation et la recherche en commun de solutions qu’il été possible d’y mettre un terme et que la reprise économique certes inégale suivant les pays a pu intervenir. La nouvelle menace que fait peser le président américain sur l’économie mondiale, c’est que si une crise majeure devait intervenir, son attitude constante depuis son élection rendrait presque impossible la recherche de solutions permettant de la surmonter.       

    

 

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