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Le blog d'Alain Boublil

 

-0,1% : la croissance française au 2ème trimestre

L’INSEE a, à nouveau, révisé en baisse le chiffre de la croissance française au 2ème trimestre. Elle a été négative : -0,1%. La France n’avait pas connu de diminution de son PIB sur un trimestre depuis 2013. Il est donc difficile de partager l’optimisme de ceux qui considèrent que « cela va mieux ». Malgré un environnement international favorable, un faible prix du pétrole, des taux d’intérêt à leur plus bas historique et des aides fiscales considérables aux entreprises, l’économie française ne redémarre toujours pas. Et les chiffres publiés par l’INSEE comportent même des anomalies difficiles à comprendre puisque la contribution du commerce extérieur à la croissance serait positive pour la première fois depuis un an grâce à une hausse en volume de nos exportations. Mais c’est surprenant car les statistiques douanières font état depuis deux trimestres, d’une baisse significative en valeur (-1% et -0,5%). Cela supposerait que nos entreprises aient été confrontées à une baisse de leur prix à l’exportation, ce qui est difficile à imaginer. En tout état de cause, l’aggravation continue depuis deux ans du déficit commercial, hors énergie, montre que la baisse de l’euro et la pression sur les salaires n’a en rien contribué à rendre à nos entreprises la compétitivité qu’elles auraient perdue. La production industrielle, qui diminue depuis trois mois et qui n’a toujours pas retrouvé le niveau de 2010, traduit bien cette situation.

La consommation et les investissements des ménages ont fléchi au 2ème trimestre et, ce qui est logique, leur taux d’épargne est au plus haut : 14,8%. Leur taux d’épargne financière a aussi atteint le niveau très élevé de 5,8%, malgré des taux d’intérêt très faibles sur les dépôts et même la menace d’infliger aux déposants des taux négatifs. La collecte de l’assurance-vie, par exemple, a représenté 16 milliards d’euros depuis le début de l’année et l’encours total détenu par les particuliers a dépassé 1600 milliards. Et les fonds collectés par les caisses d’épargne sont également en hausse. Le rebond de la construction observé depuis neuf mois provient essentiellement des immeubles collectifs construits par des organismes sociaux, ce qui est positif, mais insuffisant. Et la reprise des transactions immobilières, après la chute de ces trois dernières années, concerne des logements anciens et ne débouche sur aucune création d’activité. Quant aux entreprises, leurs marges en 2016 sont stables à un niveau élevé, avec près de 32%  et leur taux d’autofinancement a atteint des sommets, plus de 90% en moyenne. Les avantages fiscaux qu’elles ont obtenus ont davantage servi à les désendetter et à distribuer des dividendes qu’à investir et à recruter. Le « trésor de guerre » des groupes non bancaires figurant dans l’indice CAC 40 a atteint, à la fin du 2ème trimestre 25 milliards d’euros. Ces comportements traduisent l’absence de confiance des agents économiques dans l’avenir et leur scepticisme face à la pertinence des discours optimistes.

 Ils infirment la stratégie économique conduite par le France depuis 2013. La poursuite en parallèle de deux objectifs contradictoires, la réduction du déficit budgétaire et la baisse de la fiscalité sur les entreprises, s’est traduite par un choc fiscal sans précédent sur les ménages au moment où les salaires et les retraites étaient pratiquement gelés. Le produit de l’impôt sur le revenu est passé de 60 à 73 milliards entre 2012 et 2016, hausse à laquelle s’ajoute celle des taxes sur les consommations d’énergie de près de trois milliards et le relèvement des impôts locaux. Le discours officiel sur le fait que ce choc aurait été effacé, ne résiste pas à l’analyse des chiffres publiés par Bercy. C’est l’inquiétude face à un avenir incertain et la crainte d’une baisse des revenus disponibles qui a favorisé un mouvement général de thésaurisation et rendu impossible le retour a une croissance soutenue et durable, seule à même d’avoir un effet significatif sur le chômage. Le cercle vertueux espéré de la compétitivité retrouvée s’est transformé en cercle vicieux de la stagnation et du chômage. Même le pari suivant lequel le regain de  compétitivité qu’auraient dû procurer les dispositifs fiscaux mis en place en 2013 a été perdu puisque le déficit extérieur, hors énergie, a fortement augmenté depuis.

L’examen des données sur l’emploi montre enfin que la vive dégradation observée entre 2012 et le début de l’année 2016 a été pour l’instant stoppée, mais que ce phénomène est largement dû au recours à des emplois précaires ou à temps partiel. Ceux-ci ne sont pas de nature à instaurer la réelle confiance dans l’avenir nécessaire pour faire évoluer l'attitude des entreprises et des ménages. Et ce n’est certainement pas en accroissant la précarité de l’emploi dans les entreprises et en réduisant la protection des salariés que l’on fera changer les comportements, et que l’on incitera les ménages à consommer et à investir.. Quant aux entreprises, sans clients, pourquoi embaucher ?  

Les questions économiques seront au cœur du débat des prochaines élections présidentielles et le bilan de l’action menée depuis 2012 sera difficile à défendre. La politique d’Angela Merkel en Allemagne est souvent citée en exemple en France et sert de référence. Pourtant, à chaque élection locale, la Chancelière subit de lourdes défaites, comme récemment à Berlin. Il est donc difficile de croire que les français, face aux résultats du président sortant, seront plus indulgents que les électeurs allemands.