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Le blog d'Alain Boublil

 

François Hollande: le rendez-vous du 14 janvier

Mardi, le Président de la République aura l'occasion de préciser les grandes lignes de son action au cours de la déclaration liminaire par laquelle débute, traditionnellement, une conférence de presse. Puis il répondra aux questions des journalistes, dont l'appétit a été savamment aiguisé par les propos généraux tenus lors de ses voeux télévisés le 31 décembre.

"D'où venons-nous? Où en sommes nous? Et où allons nous?" pourrait-on dire en paraphrasant le célèbre tableau de Gauguin, pour résumer l'enjeu de l'exercice. Le peintre avait, pour ambition d'illustrer le cycle et le sens de la vie. Au Président de donner un contenu au cycle et au sens de sa politique. En reconnaissant qu'il avait sous-estimé "la gravité de la crise", il a fait preuve d'une généreuse indulgence vis-à-vis de ses prédécesseurs. La situation de la France au mois de mai 2012 était au moins autant la conséquence de la "double crise", celle de la finance qui avait plongé l'économie mondiale dans la récession et celle de  l'euro qui avait mis en péril l'Europe, que des réponses inappropriées apportées par les gouvernements précédents.

Et ce n'est pas parce que l'opposition, c'est la règle du jeu, fait semblant d'oublier ses erreurs, qu'il ne convient pas de les rappeler : déficits publics et endettement massifs, chômage en hausse continuelle pendant cinq ans et déséquilibres des paiements extérieurs.

 Mais les réponses apportées le 14 janvier devront concerner avant tout le présent et l'avenir: la politique et l'engagement extérieurs de la France, l'agenda européen et enfin et surtout la stratégie économique.

Sur la scène mondiale, le message est simple et l'argumentation convainquante: la voix de la France a porté et notre pays a su faire face à ses responsabilités. En adoptant des positions fermes sur la crise syrienne comme lors de la négociation sur les activités nucléaires de l'Iran, nous avons contribué à trouver des solutions équilibrées et durables. La Syrie a renoncé à son arsenal chimique et l'Iran a accepté de placer sous contrôle international ses activités, limitant par cela ses possibilités d'enrichissement.

En Afrique, la France ne s'est pas dérobé et a été fidèle à ses valeurs en intervenant à deux reprises, en liaison avec ses partenaires africains, dans un cas pour porter un coup d'arrêt à des activités terroristes qui déstabilisaient un Etat, le Mali, et dans l'autre, pour prévenir une guerre civile qui aurait provoqué des centaines de milliers de morts. Que n'aurait-on entendu si notre pays avait assisté à ces atrocités en tournant la tête et en se "lavant les mains". On dit  souvent aussi que la France est "isolée" dans son action. Cette remarque devrait plutôt s'adresser à nos partenaires, qui ne se sentent pas suffisamment concernés pour défendre des principes qui sont pourtant au coeur de notre projet commun. 

Le deuxième terrain sur lequel François Hollande est attendu est l'Europe. D'où venons-nous? Les observateurs ont la mémoire courte. Il y a moins de deux ans, la zone euro était au bord de l'explosion, la contagion de la crise menaçait, après la Grèce, l'Irlande et le Portugal,  l'Espagne voire l'Italie. La France a joué un rôle déterminant dans sa résolution. Mais elle a dû, pour cela, retrouver toute sa crédibilité financière et donc inverser la courbe de ses déficits.  Sans cela,  l'Allemagne n'aurait pas pu faire face seule à la crise et soutenir, à la demande de la France, et contre l'avis d'un parti politique membre de la coalition au pouvoir, le FDP, les solutions proposées par la BCE. Ainsi a pu être évitée une fin de l'euro en catastrophe et le chaos. Mais il est vrai que le tournant fiscal de 2013, qui a en été la conséquence n'a pas été étranger à un puissant mouvement de mécontentement, alimenté par une opposition qui était, en l'espèce, assez mal placée pour donner des leçons. D'où  la chute de la popularité de François Hollande.

La feuille de route européenne n'est pas dégagée pour autant. Si la crise fatale a été évitée, il faut redonner du sens au projet pour que celui-ci retrouve l'adhésion des peuples. La convergence qui s'amorce avec l'Allemagne, sauf peut-être sur les questions énergétiques, et le rétablissement de la situation financière des pays de l'Europe du sud augurent bien d'une reprise de la croissance. Encore reste-t-il à régler des questions aussi sensibles que la lutte contre le "moins-disant social", qui fait des ravages parmi les populations et surtout la fin des pratiques d'optimisation fiscale qui plombent les comptes des Etats sans aucun bénéfice pour la croissance et l'emploi. Tel devrait donc être l"Agenda européen" des prochaines années.

L'agenda de la France n'est pas moins chargé. Où en sommes-nous? On ne répare pas en dix-huit mois, dix ans d'erreurs. Surtout, le poids de l"Agenda européen" au deuxième semestre 2012 a monopolisé l'action du gouvernement qui n'a pas alors pris toute la mesure des difficultés à laquelle la France était confrontée. Tel est sûrement le sens de l'aveu de François Hollande sur la gravité sous-estimée de la crise. A cela se sont ajoutées des mesures fiscales, comme la taxe sur les 75% et l'affaire des "pigeons" qui ont donné une image erronnée de la stratégie économique et de la vision du Président de la République. On ne saurait se fixer comme objectif le redressement productif tout en stigmatisant les entreprises, leurs dirigeants et leurs actionnaires. Mais tout cela va rentrer dans l'ordre et un minimum de stabilité va être instauré dans les prélêvements.

Sur le plan conjoncturel, le pire est derrière nous. La France, à la différence de la majorité des pays européens, a échappé à une deuxième récession et l'année 2014 sera celle de la reprise.

L'inflation, qui était dans le passé, un de nos points faibles, est l'une des plus basses d'Europe, ce qui est favorable au pouvoir d'achat, à l'épargne et donc à la compétitivité des entreprises. Notre déficit public se comble, ce qui n'est pas un moindre exploit, faut-il le rappeler, dans un contexte général de faible inflation et de faible croissance, et même le déficit commercial, grâce à la bonne résistance de nos exportations se réduit progressivement. Quant à la fameuse "courbe du chômage", le procès qui est fait au gouvernement est injuste: il est indiscutable que le deuxième semestre 2013, marque la fin de cinq années consécutives de hausse. Ce n'est déjà pas si mal. Et l'inversion est sinon engagée, on en aura la confirmation dans les prochains mois, du moins imminente. Mais cela ne suffira pas à remettre la France sur une trajectoire de croissance suffisamment élevée et engager le cercle vertueux de l'investissement et des créations d'emploi. D'où les "réformes de structure" qui doivent impérativement compléter l'action engagée.

Et ce ne sera pas la conséquence d'un prétendu "tournant", qui serait immédiatement interprété comme un aveu d'échec, et qui n'a pas lieu d'être, mais résultera, au contraire, d'une mise en oeuvre de la vision présidentielle: réduction des coûts de fonctionnement des organisations publiques, instauration d'une conditionnalité dans les dispositifs d'incitation à l'égard des entreprises, approfondissement du dialogue social, etc...

Dans bien des domaines (retraites, flexibilité, pénibilité, formation professionnelle, contrats de génération, etc...) la voie est tracée. Faut-il, pour qualifier cette politique, avoir recours à une terminologie qui serait forcément empruntée à des expériences passées et souvent étrangères? Evidemment non. La politique qui sera menée sera celle inspirée par François Hollande. Et si, après quelques années, elle a porté ses fruits, alors, les politologues trouveront certainement le terme qui convient !!